Les étables d’altitude en vallée de Campan : les courtaous.
L’ archéologie atteste de l’usage ancien des pâturages d’altitude. Depuis la préhistoire, en effet, les montagnards des Pyrénées ont accompagné leurs troupeaux sur les estives.
Dans les Pyrénées occidentales les communautés pastorales ont développé un modèle culturel démocratique original fondé sur :
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- une gestion en grande partie collective de la terre ( environ 80 %),
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- une structure familiale non patriarcale où des rôles différents étaient attribués aux ainé(e)s et aux cadet(te)s au sein d’un ensemble patrimonial appelé « Maison ».
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- et une valorisation très importante des rapports de voisinage.
Ce modèle social et les modalités des élevages qui leur furent associés se sont développés suivant de nombreuses variantes suivant les lieux et les époques.
En vallée de Campan, les XVIIIème et XIXème siècle correspondent à une période de développement maximum de l’agro-pastoralisme. Outre la vente des veaux et des agneaux, l’élevage des vaches et des brebis était ici tourné essentiellement vers la production de beurre et de laine.
Dès la fonte des neiges les troupeaux quittent les granges de la vallée vidées de leurs réserves de fourrage pour monter jusqu’aux pâturages communautaires, les « estives ».
Aussi chaque troupeau est- il compté. Il a sa place assignée dans la montagne et les bêtes portent la marque distinctive de la « Maison » à laquelle elles appartiennent.
La séparation entre les prairies et les bois exploités par les « Maisons », en bas, et les espaces communautaires, en haut, se situe autour de mille mètres d’altitude. Elle est matérialisée par un mur sur de longs segments.
Les courtaous.
Les courtaous étaient destinés à un habitat saisonnier permettant la traite quotidienne des vaches laitières. Ils sont particulièrement nombreux en vallée de Campan et regroupent généralement plusieurs cabanes. Situés entre 1000 et 1500m d’altitudes, nombre d’entre elles sont aujourd’hui en ruines. Les cabanes sont souvent contigües à un enclos et à une étable ouverte sur un côté. La plupart des constructions en pierres sèches qu’on peut encore voir de nos jours ont été édifiées au XVIIIème siècle.
L’usage de chaque cabane, enclos et étable, édifiés sur des estives communales, était réservé à une famille d’éleveur particulière qui assurait l’entretien des bâtiments et de ses abords.
Les différents usagers du courtaou s’occupaient en commun de l’aménagement et l’entretien des chemins d’accès et des dispositifs (rigoles, leytés ou puits à glace) destinés à la conservation du lait et de la crème.
Le vacher, souvent un tout jeune homme ou même un adolescent, logeait l’été dans la cabane pendant que le reste de la famille était occupé, plus bas dans la vallée, par la récolte du fourrage. Il avait la charge des troupeaux, il trayait les laitières et prélevait la crème. Plusieurs fois par semaine une sœur, un jeune frère ou une cousine montait le ravitailler. La précieuse crème était descendue au retour. C’est la maîtresse de maison qui veillait à la fabrication et à la vente du beurre. Son mari avait la charge des soins et de la vente du bétail.
La vie était rude dans les « courtaous » mais, lors des belles soirées d’été, elle était égayée par les chants et les danses de la jeunesse. Souvent, pour séduire sa belle ou tromper la solitude,le berger se faisait poète.Il apportait sa pierre à une riche anthologie de langue bigourdane transmise de bouche à oreille dans les veillées.
Didier RÖSCH